L’appel de Dieu, comme nous l’avons dit, comprend l’envoi. Il n’y a pas de vocation sans mission. Et il n’y a pas de bonheur ni de pleine réalisation de soi sans offrir aux autres la nouvelle vie que nous avons trouvée. L’appel divin à l’amour est une expérience qui ne peut être réduite au silence. « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile », s’exclame saint Paul. Et la première Lettre de Jean commence ainsi : Ce que nous avons entendu, vu, contemplé et touché, c’est-à-dire le Verbe fait chair, nous vous l’annonçons aussi pour que notre joie soit complète.
Il y a cinq ans, dans l’Exhortation apostolique Gaudete et Exsultate, je m’adressais ainsi à chaque baptisé : « Toi aussi, tu dois concevoir la totalité de ta vie comme une mission » (n. 23). Oui, parce que chacun de nous, sans exception, peut dire : « Je suis une mission sur cette terre, et c’est pourquoi je suis dans ce monde ».
La mission commune à tous les chrétiens est de témoigner joyeusement, en toute situation, par des attitudes et des paroles, de ce que nous vivons en étant avec Jésus et dans sa communauté qu’est l’Église. Elle se traduit par des œuvres de miséricorde corporelle et spirituelle, par un style de vie accueillant et doux, capable de proximité, de compassion et de tendresse, à contre-courant de la culture du rejet et de l’indifférence. Être le prochain, comme le bon Samaritain, nous permet de comprendre le « cœur » de la vocation chrétienne : imiter Jésus-Christ qui est venu pour servir et non pour être servi.
Cette action missionnaire ne découle pas simplement de nos capacités, de nos intentions ou de nos projets, ni de notre volonté, ni même de notre effort pour pratiquer les vertus, mais d’une expérience profonde avec Jésus. Ce n’est qu’alors que nous pouvons devenir les témoins de Quelqu’un, d’une Vie, et cela fait de nous des « apôtres ». C’est alors que nous nous reconnaissons « marqués par cette mission d’éclairer, de bénir, de vivifier, d’élever, de guérir, de libérer ».
Les deux disciples d’Emmaüs sont une icône évangélique de cette expérience. Après leur rencontre avec Jésus ressuscité, ils se confient l’un à l’autre : « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? ». En eux, nous pouvons voir ce que signifie avoir « un cœur brûlant et des pieds en marche ».